L'HABIT NEUF DE L'EMPEREUR
 

D'APRES UN CONTE D'ANDERSEN

un spectacle d'ombres de

Christophe Bastien-Thiry

texte de

Cécile Bourrier


Livret contenant

Les personnages de l'histoire prêts à découper

Les indications de montage

Quelques tableaux d'ensemble

Le texte avec des indications de mise en ombre



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La procession de l'Empereur



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Les personnages de l'histoire
 

L'empereur en costume


L 'empereur nu



 

Le chambellan



 

Le ministre



 

Le serviteur



 

Un filou à son métier à tisser



 

L'autre filou à son métier à tisser



 

Les filous devant l'Empereur



 

L'Empereur sur le trône



 

L'atelier des filous




Indications de montage

Indications de montage des filous à genou



 

Indication de montage de l'Empereur nu



 

Indication de montage de l'Empereur en costume



 

Indication de montage de l'Empereur sur le trône



 

Indication de montage du Chambellan



 

Indication de montage du Ministre



Tableaux d'ensemble

Les filous se faisant remettre les sacs d'or



 

L'Empereur et le Ministre se rendant dans l'atelier des filous


La procession de l'Empereur




Le Texte
 

Premier tableau

Apparition progressive du château en jouant sur la direction de la lampe, faire des effets de lumière avec un cache, faire des bruits d'animaux nocturnes, quand l'empereur est en vert mettre une lumière verte, quand il est en rouge lumière rouge, etc... Quand il monte faire avec la flûte à piston un son montant et inversement.

CONTEUR: II y a bien longtemps, dans un royaume lointain, vivait un empereur, le plus coquet de tous les empereurs. Il aimait par dessus tout les beaux habits neufs. Et c'est à la toilette qu'il consacrait et son or et son temps, plus qu'à ses sujets, ses chevaux ou son parlement. A chaque heure du jour, il changeait d'atours et jugeait de l'effet sur sa cour.

L'empereur commence ses allées et venues

CONTEUR: Des fenêtres du château, on le voyait passer de sa chambre à son trône, et de son trône à sa chambre, vêtu d'un habit vert, vêtu d'un habit rouge, vêtu d'un habit bleu...et comme on dit d'un roi: "II est au conseil", on disait de lui:

UNE VOIX: "L'empereur est dans sa garde robe! "

Extinction de la lumière


Deuxième tableau

CONTEUR: On s'amusait bien dans la grande ville où l'empereur vivait et beaucoup d'étrangers y venaient en visite. Un jour arrivèrent deux escrocs.

Lumière, seule la partie gauche de l'écran est éclairée.

Ces escrocs se faisaient passer pour tisserands et même.. .mais écoutez plutôt:

Décor: l'empereur dort assis à son trône.

L'EMPEREUR: Rrrronn pffîf..., rrronn pffîT...

Arrive le serviteur.

LE SERVITEUR: Humm. Humm ...Majesté?

L'EMPEREUR: Rrrronn pffîT..., rrronn pffff.. .Hein quoi? On me dérange! pffT.. .je suis si occupé!

LE SERVITEUR: Majesté pardonnez moi...Deux tisserands viennent d'arriver. Majesté. Ils sillonnent

en vantant leur talent. Ils prétendent... Oh Majesté. Ils racontent partout... des choses... !

animer le serviteur pendant le discours des filous

SECOND FILOU en chantant: Nous sommes des tisserands qui savons bien tisser

Nous tissons des étoffes, venez les admirer, vous serez étonnés!

Notre dernier ouvrage est une création qui passe l'imagination!.

PREMIER FILOU: Et oui, vous serez épatés de ses qualités!

Car notre tissu est doté d'un pouvoir absolument prodigieux! Absolument sensationnel!

Mais si vous êtes idiots ou même paresseux, restez chez vous!

Ne vous déplacez pas, vous perdrez votre temps.

En effet, notre étoffe à la propriété merveilleuse d'être invisible

à tous les incapables et tous les imbéciles. Ils ne sauraient la voir.

Aux honnêtes et aux intelligents, le privilège d'en jouir!

LE SERVITEUR: Enfin, voilà, c'est ce qu'ils disent, Majesté.

Mettre les deux filous en partie droite de l'écran.

L'EMPEREUR: Quelle chose admirable!...
en apparté Si je portais de tels habits, je pourrais reconnaître les intelligents des imbéciles; je saurais enfin qui dans mon royaume travaille à me servir. Ah il me faut cette étoffe au plus vite.
tout haut Serviteur, faites entrer ces tisserands!

LES FILOUS: obséquieux Majesté,....majesté,....majesté.

Les deux filous se répandent en courbettes

SECOND FILOU: Majesté, nous sommes des tisserands.

Nous avons réservé pour vous nos dernières créations.

Nous tisserons pour vous quelque chose de somptueux!

PREMIER FILOU: Une étoffe aux étonnantes propriétés.

Tenez vous bien Majesté! Les paresseux comme les gens stupides d'ailleurs sont incapables de l'apercevoir. Elle est pour eux, invisible!

L'EMPEREUR: Oui, j'ai entendu parler de vos talents,... il me faut ce tissu à tout prix.

PREMIER FILOU: Majesté quel honneur! Nous nous tenons à l'entière disposition de votre Majesté.
Si votre Majesté avait la bonté de nous donner l'or nécessaire à la réalisation de ce joyau, nous nous mettrons à l'ouvrage sur le champ...

SECOND FILOU: ...afin que votre Majesté puisse porter au plus tôt des vêtements digne d'Elle.

L'EMPEREUR: Ah oui bien entendu. Tenez donc, voici quelque argent. Faites vite.

CONTEUR: L'empereur ouvrit son coffre et tira un, et deux, et trois sacs d'or.. .qui firent l'affaire des filous, n'en doutez pas..

PREMIER FILOU: Merci, merci Monseigneur.

pendant que les filous se retirent

LES FILOUs: obséquieux Merci, merci Majesté, merci, merci

Extinction de la lumière


Troisième tableau

Décor: la maison des tisserands.

Les compères installèrent bien deux métiers à tisser, réclamèrent les plus beaux fils de soie, les fils d'or

les plus brillants qu'ils fourrèrent aussitôt dans leur sac, et se mirent au travail!...

Enfin ils parurent se mettront à l'ouvrage, puisqu'il n'y avait rien sur leur métier, aucun fil!

Lumière - Puis ricanements des filous.

PREMIER FILOU: Hé compère tu es bien lent. Ça n'avance pas ce travail!

DEUXIEME FILOU: Tiens donc, tu ne verrais pas ma belle ouvrage! Hé tu es trop bête sans doute.

Rires

PREMIER FILOU: Tiens, coupe moi ce fil... Pas celui là voyons. Celui-là... le jaune!

Rires

DEUXIEME FILOU: Pour être bête, faut il être bête!

Esclaffements

PREMIER FILOU: Hum hum... Au fait, les, comment dire.. Les chutes, qu'en as tu fait?

DEUXIEME FILOU: A l'abri mon garçon, bien à l'abri. Mazette quel magot! Allez du nerf, du jarret. Agite les bras, remue les jambes, fait grincer ton métier. Qu'ils en aient pour leur salive tous ces braves gens. Mais regarde les béer d'admiration! Il n'y en a pas un pour dire à son voisin "tu vois quelque chose toi?"

Y a pas à dire, c'est fatiguant de ne rien faire!

CONTEUR: Et ils firent ainsi semblant de tisser, sans fil, jusque tard dans la nuit.

Bruits de métier à tisser. Extinction de la lumière.


Quatrième tableau

Décor: dans la moitié gauche de l'écran, l'empereur, debout, tandis que l'on installe dans l'autre moitié non éclairée les deux métiers des filous.

L'EMPEREUR: Je brûle de savoir où ces braves gens en sont de leur travail. Et ma vue qui faiblit... Si j'allais mal discerner les couleurs: jaune pour safran... safran pour sable...

Hum, il serait prudent d'avoir un premier avis. Voyons qui pourrais je bien envoyer!

C'est ça, je vais envoyer mon vieux et honnête ministre. Avec lui rien à craindre. Il est intelligent et personne mieux que lui ne remplit son emploi. Il saura voir l'étoffé et si elle mérite tout ce tintamarre.

fort

Serviteur!

Le serviteur ne fait qu'apparaître.


Cinquième tableau

CONTEUR: Le vieux et honnête ministre se rendit donc dans l'atelier où les deux menteurs travaillaient sur leurs métiers vides.

Décor: les deux filous sont assis à leur métier et font semblant de travailler, le vieux ministre arrive par la gauche, éclairage sur tout l'écran à la fin de la musique. Bruits de métiers à tisser.

LE MINISTRE: en aparté Dieu, aie pitié de nous! Je ne vois rien du tout! Est-ce possible? Grands Dieux!

CONTEUR: Mais tout en écarquillant les yeux, il se garda bien de l'avouer.

LE SECOND FILOU: N'hésitez pas à vous approcher... Alors qu'en dites vous! Vous êtes surpris n'est-ce pas? Hein quelles couleurs; quelle pureté dans le dessin! Le motif est exquis!

CONTEUR: Et le filou montrait le métier vide, soulignait de son doigt un tracé imaginaire. Le pauvre ministre ouvrait des yeux de plus en plus grands, mais il ne voyait rien puisqu'il n'y avait rien.

LE MINISTRE: en aparté Grands dieux, serais-je bête? Je ne l'aurais jamais cru et personne ne doit le savoir. Est-ce que je remplis mal mes fonctions? Non, c'est impossible! Taisons nous! Il convient surtout de ne pas dire que je ne vois pas l'étoffé.

LE SECOND FILOU: Eh bien, vous n'en dites rien?

LE MINISTRE: tout haut Oh! c'est vraiment joli, c'est tout à fait magnifique. Ce motif... !Ces couleurs!... Oui je dirai à l'empereur que cela me plaît infiniment.

LE PREMIER FILOU: - Ah cela nous fait plaisir!

CONTEUR: Le vieux ministre s'en fût au palais, et s'y répandit en éloge sur la beauté du tissu.

Extinction de la lumière


Sixième tableau

Même décor, le chambellan arrive aussi par la gauche, bruits de métier à tisser.

CONTEUR: Quelques temps après, l'empereur envoya un autre fonctionnaire honnête, son chambellan, grand maître de la garde robe, pour voir où en était le tissage et si l'étoffé serait bientôt prête.

et dire sur la musique:

LE CHAMBELLAN: Ah, montrez moi cette merveille! Hoooo.. interloqué et en aparté je ne vois rien!

LE PREMIER FILOU: - Alors, vous vous taisez! n'est-ce pas là une belle pièce d'étoffé? Ne voyez vous pas ce fini, là cette brillance. N'hésitez pas à toucher, hein, cette matière fluide! On croirait du satin. Mais ce n'en est pas !

LE CHAMBELLAN : - en aparté Je suis trop intelligent pour être bête! Cela ne peut être cela. Je manquerai de zèle au service de mon roi! Maudit tissu, comment le sait-il?! Surtout n'en laissons rien paraître...

Tout haut : Ah quelle merveille! quel ravissement pour les yeux!.. .je dirai à l'empereur que c'est tout ce qu'il y a de plus beau, de plus magnifique!.

LES FILOUS: - Ah, nous sommes contents!

Extinction de la lumière

CONTEUR: Et tous les gens de la ville parlaient du tissu extraordinaire, invisible aux idiots, incapables et autres ânes bâtés....

LE SECOND FILOU: - Quel âne ce chambellan, hé hé hé!


Septième tableau

Décor: l'atelier des filous, la nuit, effets de lumière.

Alors l'empereur, n'y résistant plus, manifesta le désir d'essayer le somptueux habit, pour le porter à la grande procession qui devait traverser la ville.

Lumière

PREMIER FILOU: - Tu sais l'empereur, il n'en plus d'impatience, il veut essayer son nouveau costume.

SECOND FILOU: - Tu vas voir le bel habit que nous allons lui tailler.

PREMIER FILOU: - Et, c'est qu'il veut le porter à la grande procession qui va traverser la ville!

LES FILOUS: - Hé, hé, hé, hon, hon, hon.

CONTEUR: Toute la nuit, les escrocs furent à l'œuvre avec plus de seize chandelles allumées. La ville entière pouvait voir la peine qu'ils se donnaient pour achever les habits neufs de l'empereur. Et ils faisaient le geste d'enlever l'étoffe du métier, et ils coupaient l'air avec de grands ciseaux, et ils cousaient avec des aiguilles sans fil. Ils s'écrièrent enfin :

LES FILOUS: - Voilà! Le costume est terminé!

Extinction de la lumière.


Huitième tableau

Arrivée en fanfare de l'empereur, tambourin, flûte, sifflets, nombreux vivas et applaudissements. Les courtisans apparaissent rapidement les uns après les autres pour ne pas encombrer l'écran (effet de multitude en les retournant), le vieux ministre est là aussi, puis dire:

Dès l'aube l'empereur se déplaça avec ses courtisans les plus hauts placés, ministre, chambellan, palefreniers et échansons, pages laquais lévriers. Toute la cour était présente et se pressait sur ses talons à la porte des deux filous.
Dire la suite rapidement

LE SECOND FILOU: - Bienvenue à notre empereur! Quel honneur pour notre maison, etc

LA COUR: Vivas, vivas, longue vie à l'empereur...

LE PREMIER FILOU: - Notre demeure est toute petite. Nous sommes si confus.

L'EMPEREUR: Braves tisserands, on m'a rapporté que vous aviez fait un travail exceptionnel, heu.. humm. Peut-on voir ce chef d'œuvre?

LE PREMIER FILOU: - Mais seigneur, il est là, devant vous!

L'EMPEREUR: - Hooo... en aparté Comment, mais je ne vois rien! C'est impossible. Je suis l'empereur. Il est impossible à l'empereur d'être bête. Alors je ne suis pas capable d'être empereur. Ces choses là sont terribles et doivent rester cachées.

LE PREMIER FILOU: - Voici le pantalon, voici l'habit, voilà le manteau!

L'EMPEREUR: - Mais... oui, bien sûr! Oh c'est très beau! Oui. Oui, vous avez ma plus haute approbation!

LE PREMIER FILOU: - C'est léger comme une toile d'araignée. On croirait n'avoir rien sur le corps!

LE SECOND FILOU: - C'est justement la qualité de l'étoffe.

LE CHAMBELLAN: - N'est-ce pas magnifique? Que votre Majesté admire ce dessin, ces teintes.

LES COURTISANS: - Magnifique! Ravissant! Parfait!

LE SECOND FILOU: - Votre Majesté impériale veut-elle avoir l'insigne bonté de retirer ses vêtements, afin que nous puissions lui mettre les nouveaux, là devant ce miroir.

Installation de la cabine avec le miroir, l'empereur passe derrière et on tire le rideau

L'empereur enleva tous ses beaux vêtements et les escrocs firent le geste de lui tendre, l'un après l'autre, les nouveaux qui étaient soi-disant cousus. L'empereur se tourna et se retourna devant le miroir, comme s'il les admirait.

La suite dit rapidement:

LE SECOND FILOU: - Dieu ! Comme cela va bien! Comme c'est bien pris!

LES COURTISANS: - Quel dessin! Quelles couleurs! En voilà un luxueux habit!

LE CHAMBELLAN : - très fort La procession va commencer votre Majesté.

L'EMPEREUR: Je suis prêt; cela va-t-il bien?

CONTEUR: Et il se tourna encore une fois devant le miroir pour avoir l'air de bien examiner son habit neuf.

Extinction de la lumière


Neuvième tableau

A nouveau musique de fanfare, le temps d'installer le décor de la procession. L'empereur, suivi du chambellan, arrive par le côté gauche de l'écran seul éclairé, on ne découvre que progressivement le reste en même temps que les applaudissements et les vivas augmentent. Lumière multicolore pour effet de fête.

CONTEUR: Il sortit enfin et le chambellan qui devait porter la traîne marchait les mains levées devant lui, car il ne voulait surtout pas que l'on s'aperçut qu'il ne voyait rien. L'empereur fendit la foule massée aux fenêtres, aux portes des maisons, le long des rues et tous l'acclamaient,

Sur les cloches à toute volée.

LES SUJETS: - sur un ton populaire Bravo, vive l'empereur, bravo.. .Qu'il est beau! Oh la là!... Dis donc!... C'est superbe!... Bravo bravo. Regarde un peu la traîne!

CONTEUR: Jamais un habit neuf de l'empereur n'avait remporté un tel succès!

UN ENFANT: - Mais, il n'a pas d'habit du tout!

CONTEUR: cria un petit enfant dans la foule.

LE PERE: - Chuchotements Grands Dieux! entendez, c'est la voix de l'innocence.

CONTEUR: dit son père.

Chuchotements de bouche à oreille et de plus en plus fort:

UN SUJET: - II n'a pas d'habit du tout!

UN AUTRE: - II n'a pas d'habit du tout?

UN AUTRE: - Un petit enfant dit qu'il n'a pas d'habit du tout.

UN SUJET: - II n'a pas d'habit du tout! Il n'a pas d'habit du tout!

En chœur et très fort:

LA FOULE: - IL-N'A-PAS-D'HABIT-DU-TOUT!

CONTEUR: finit par crier le peuple tout entier.

CONTEUR: L'empereur eut un frisson, car il lui semblait bien que ses gens avaient raison, mais il pensa qu'il lui fallait subir la procession jusqu'au bout; et il prit une allure encore plus fière, et les chambellans marchèrent, tenant la traîne qui n'existait pas.

FIN